L’Observatoire International des Violences envers les Femmes : un engagement pour les droits des femmes en Afrique
Retour sur le séminaire « Pour des territoires protecteurs des femmes victimes de violences » organisé par l’Observatoire international des violences envers les femmes, la Commission inclusion, participation citoyenne et droits humains et la Ville de Banjul.
Du 22 au 24 janvier 2024 s’est déroulé le second séminaire régional du programme "Pour des Territoires protecteurs des femmes victimes de violences », co-financé par l’Agence Française du Développement, dans la ville de Banjul, en Gambie. Cet événement, organisé par l'Observatoire international des violences envers les femmes, la CISDPDH de CGLU, ainsi que la Ville de Banjul, a rassemblé 12 gouvernements locaux d’Afrique, mais également des organisations de la société civile gambienne et des expertes sur les violences faites aux femmes. La semaine de travail s'est achevée par l'adhésion de 12 nouvelles collectivités d'Afrique au réseau mondial de l'Observatoire international des violences envers les femmes.
Après le succès de notre premier séminaire à Iztapalapa, au Mexique, centrée sur le contexte latino-américain, notre attention se porte désormais sur l’Afrique. Cette deuxième édition du séminaire s’attache à comprendre la réalité des violences faites aux femmes dans le contexte africain, à identifier les besoins locaux en matière de prise en charge des victimes et à encourager le dialogue politique pour une action concertée au niveau local. Ce séminaire s’est articulé autour de quatre thématiques principales : les mutilations sexuelles féminines, les mariages forcés et précoces, les violences sexuelles faites aux filles et en situation de conflits armés.
La ville de Banjul a accueilli l’événement, présidé par la Maire Rohey Malick Lowe, également présidente du Réseau des Femmes Élues Locales d’Afrique (REFELA). Le REFELA est un réseau qui rassemble les femmes maires et élues locales à travers l’Afrique pour promouvoir une gouvernance locale sensible au genre. Dans le cadre de cette initiative, la maire de Banjul a mobilisé plusieurs femmes de son réseau national en Gambie pour travailler sur les violences faites aux femmes.
La Maire de Banjul, Rohey Malick Lowe, a ouvert le séminaire en présence de Jean-Charles Allard, Chargé d’affaires de l’Ambassade de France en Gambie, de Clémence Cazaux, représentante de l’Agence française de développement (AFD), de Pascale Labbé, Vice-présidente du Conseil départemental Seine-Saint-Denis et d’Ernestine Ronai, responsable de l’Observatoire départemental des violences envers les femmes(1).
La première session théorique sur le thème « Introduction des violences faites aux femmes à l’échelle locale », animée par Amélie Videau, coordinatrice de l’Observatoire international des violences faites aux femmes, et Ernestine Ronai, a permis aux participantes de comprendre les enjeux de la lutte contre les violences faites aux femmes à l’échelle locale. Les bonnes pratiques tirées du séminaire d’Iztapalapa au Mexique ont été présenté, notamment les Utopias. Ernestine Ronai a également exposé la stratégie des agresseurs en cas de violences sexuelles. Les violences faites aux femmes sont universelles, elles n’épargnent aucun pays, aucune culture, aucun milieu social.
Pour en savoir plus sur les Utopias : cliquez-ici
- Prévenir les mutilations sexuelles féminines : partage d’expériences
La première séance de travail s’est poursuivie avec un atelier de formation sur la thématique des mutilations sexuelles féminines (MSF). Yvette Kabuo (Coordinatrice socio-juridique-économique projet NGENGO, République centrafricaine) a partagé quelques outils pour repérer et réparer les victimes de mutilations sexuelles. Sur la base de son expérience, elle a préconisé la mise en place d’un « Guichet unique » localisé au sein des hôpitaux, destiné à recevoir les victimes de MSF et à coordonner leur prise en charge. Ce guichet unique offre une gamme de services de réparation, comprenant des interventions médicales physiques, psychologiques et socio-économiques, adaptées aux besoins spécifiques des victimes. Elle a également souligné l’importance de fournir des services associés au sein des hôpitaux, afin de garantir une prise en charge holistique et intégrée des victimes de MSF.
Plusieurs témoignages ont enrichi la compréhension des réalités de terrain tels que celui de Léonie Gomis de la Plateforme des Femmes pour la Paix en Casamance, Sénégal. Elle a exposé que les exciseuses développent des stratagèmes pour contourner les lois interdisant les MSF, notamment en opérant de manière clandestine et en changeant leurs méthodes. Elle a mentionné que les excisions sont parfois pratiquées dès le berceau, mettant en lumière l’évolution des pratiques pour échapper à la répression légale. Le phénomène de l’extraterritorialité, où des personnes traversent les frontières pour pratiquer les MSF dans des pays où la législation est moins contraignante, est également très présent et appelle donc à la vigilance des gouvernements locaux.
Ernestine Ronai a témoigné de l’expérience en Seine-Saint-Denis dans la lutte contre les MSF. Les MSF sont punies par la loi en France, cette interdiction s’applique même aux cas où la mutilation a été réalisée à l’étranger et lorsque la famille de la victime réside en France. Les parents peuvent être condamnés jusqu’à 15 ans de prison. De plus, les réparations pour les victimes sont prises en charge à 100% par la sécurité sociale. En ce qui concerne la prévention, la Seine-Saint-Denis sensibilise les femmes enceintes dans les centres de Protection Maternelle et Infantile (PMI). De plus, elle a mentionné l’importance de la prévention auprès des jeunes filles scolarisées.
Pour clôturer cette première journée, les participantes ont visité le Centre pour les victimes de violations des droits humains en Gambie du temps de la dictature[2].
- Les mariages forcés et précoces : les outils gambiens pour prévenir les violences faites aux femmes et aux filles
Les échanges ont débuté par plusieurs interventions d’expertes gambiennes, notamment celle d’Anna Jaiteh, avocate de l’Association des Femmes Avocates de Gambie (FLAG). Elle a décortiqué les textes internationaux condamnant ces pratiques, plaidant pour une prise de conscience accrue au niveau local et régional. Elle a souligné que la loi gambienne offre un cadre juridique solide, mais que l’espoir de mettre fin à ces violations des droits humains réside dans l’éducation, l’autonomisation et la sensibilisation des communautés. Les récits se sont poursuivis avec les témoignages des membres du réseau des Femmes Élues Locales d’Afrique (REFELA) en Gambie, montrant les efforts conjoints pour investir dans la jeunesse et l’autonomisation des filles.
Phebian Ina Grante Sagnia, infirmière et spécialiste en santé reproductive au Ministère de la Santé en Gambie, a présenté un outil permettant de sensibiliser et de prévenir les mariages forcés et précoces, mais également les MSF. Le « Funneh Board Game » est un outil ludique et pédagogique développé en Gambie, ayant pour objectif de briser les tabous et les préjugés sur des thématiques en lien avec les violences faites aux femmes, notamment en matière de santé sexuelle et reproductive.
Les participantes ont souligné que, malgré l’existence de cadres juridiques dans de nombreux pays, la mise en œuvre de ces lois reste un obstacle majeur à la protection des droits des femmes et des filles. De plus, la difficulté de collaborer avec les représentants religieux a été mentionnée.
Malgré les différences culturelles, un même cri de résistance résonne : l’urgence d’agir, de sensibiliser et de protéger les droits fondamentaux des filles et des femmes. Les ateliers pratiques ont permis de prendre conscience des obstacles auxquels nos participantes sont confrontées. De nombreuses propositions ont émergé pour surmonter ces freins, mettant en avant l’importance cruciale de la sensibilisation à toutes les échelles, que ce soit dans les communautés rurales, au niveau local ou au sein des établissements scolaires. Cependant, il est important de souligner que cette sensibilisation se heurte souvent à un manque de ressources, notamment sur le plan financier.
- Les stratégies de lutte contre les violences sexuelles en temps de guerre et sur les filles
En écho et par solidarité envers nos partenaires palestiniennes, il était important d’aborder les questions des violences sexuelles en temps de guerre. Cette réalité, ancrée aussi dans le contexte africain, nécessite une attention particulière et des actions concrètes pour garantir la sécurité et la protection des filles et des femmes dans ces situations où elles sont les plus vulnérables. Même si nos partenaires palestiniens n’ont pas pu participer physiquement au séminaire, nous avons pu diffuser une vidéo de Mayssoun Dawoud, Responsable de l’Observatoire des violences faites aux femmes à Djénine en Palestine, lors de la cérémonie d’ouverture.
Pour en savoir plus sur la situation à Djénine : cliquez-ici.
Grâce à son expérience en République centrafricaine et en République démocratique du Congo, Yvette Kabuo a présenté les problématiques des viols de guerre. Elle a mis en lumière l’impact destructeur de ces violences sexuelles sur les femmes mais aussi sur les communautés. Elle a également mis en évidence les répercussions à long terme de ces violences, y compris sur les générations futures, soulignant comment les traumatismes vécus par les victimes peuvent se perpétuer et affecter la santé mentale et émotionnelle des enfants et des jeunes adultes ayant grandi dans un contexte de conflit armé. Elle a également mis en lumière la reproduction des violences, notamment les violences conjugales, dans les contextes de conflit armé, expliquant que les victimes, souvent traumatisées, reproduisent ces violences dans leurs foyers. Cette dynamique entraîne une hausse significative des violences conjugales pendant les conflits armés et persiste même après leur fin.
Dans une deuxième session théorique, Ernestine Ronai a partagé son expertise tirée de son expérience au sein de la Commission Indépendante sur les Violences Sexuelles faites aux Enfants (CIVISE, France). Elle a souligné le manque de reconnaissance de la parole des enfants victimes de violences sexuelles, souvent minimisée et peu écoutée. Elle a mis en évidence le déni prévalant dans nos sociétés face à ces réalités, malgré des statistiques alarmantes : en France, 5,5 millions de personnes déclarent avoir été victimes de violences sexuelles durant leur enfance, soit un enfant toutes les trois minutes.
Ernestine Ronai a également mis en relief les obstacles à l’accès à la justice pour les victimes, soulignant les lacunes du processus judiciaire, caractérisé par un taux élevé de classements sans suite (74%) et une faible proportion de condamnations (seulement 7%). Elle a aussi décrit les traumatismes psychotraumatiques associés, tels que l’amnésie traumatique, qui peuvent persister tout au long de la vie adulte des victimes.
Les participantes ont eu l’opportunité d’explorer toutes les thématiques abordées durant le séminaire à travers un atelier de plaidoyer. En groupes, elles ont débattu des propositions concrètes soit au sein d’un conseil municipal, d’une assemblée nationale ou d’une session internationale à l’ONU. Les échanges ont révélé que les participantes ont su intégrer les bonnes pratiques et les outils discutés (centre d’urgence, dialogue avec les leaders communautaires pour la sensibilisation dans les communautés rurales, etc.).
La semaine s’est conclue par l’adhésion des participantes à la déclaration de Banjul, illustrant leur engagement à poursuivre le combat au niveau régional et international.
Documents et liens utiles
(1) Ernestine était accompagnée de l’équipe de l’Observatoire départemental des violences faites aux femmes de Seine-Saint-Denis, comprenant Amélie Videau, Coordinatrice de l’Observatoire international des violences envers les femmes, Maira Topall, chargée de projets internationaux à l’Observatoire, Maéva Bonnet, chargée de projets internationaux à l’Observatoire, et Moumtaez Benmabrouk, chargée de projets à la Direction Europe International de Conseil départemental de Seine-Saint-Denis.
[2] La période de dictature en Gambie, sous le règne de Yahya Jammeh de 1994 à 2017, est marquée par des violations graves des droits de l’homme, la répression politique et des élections contestées.Haut du formulaire
Observatoire international des violences envers les femmes (Seine-Saint-Denis)
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